Pourquoi le marché obligataire est sous tension ?
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Rappel : Une obligation, c’est un “contrat d’emprunt”. Si on achète un titre d’obligation français (=un bon du Trésor), on prête de l’argent à l’État et en contrepartie, il nous verse chaque année des intérêts et nous rembourse la somme prêtée au terme du placement.
Comment ça fonctionne ? Quand on parle d’obligations, on se focalise sur son rendement (l’intérêt qu’il va nous rapporter). 2 points importants :
- Leurs rendements varient inversement à la loi de l’offre et de la demande : + la demande pour une obligation est élevée, – son rendement est élevé.
- + la Banque centrale augmente les taux, + les rendements obligataires augmentent (puisque les investisseurs attendent plus de rendement quand le risque pour l’économie augmente).
Contexte : Depuis plus d’un an, la banque centrale US augmente les taux d’intérêt à court terme pour ralentir l’économie et l’inflation.
Résultat : L’économie américaine ralentit => la confiance en l’Etat américain s’évapore => la demande pour les obligations américaines baisse => les rendements obligataires à long terme (10 ans) augmentent.
“C’est positif”, vous nous direz. Eh bien pas tant que ça, puisqu’une hausse du rendement obligataire signifie une hausse du coût d’emprunt des USA (qui doivent rémunérer davantage les prêteurs) alors que son endettement est en train d’exploser, ce qui ne présage rien de bon.
- Le bon du Trésor à 10 ans a atteint son plus haut niveau depuis le début de la crise de 2007 mardi.
- Même problème en France : Hier, les taux d’emprunt à 10 ans de l’Allemagne et de la France ont dépassé le seuil symbolique des 3%, un niveau inédit depuis 2011. Cette tension sur le marché menace le budget de la France qui veut emprunter un montant record de 285 milliards d’euros en 2024?
Cerise sur le gâteau : Le plus grave dans tout ça, c’est que les rendements à court terme risquent de dépasser les rendements à long terme. En clair, les investisseurs s’attendent à une hausse des taux d’intérêt à court terme qui finira par mettre l’économie à terre et obligera la Fed à baisser les taux : il serait donc plus risqué d’emprunter à court terme. Une anomalie complète.
- Quand le rendement des bons du Trésor américain à 2 ans dépasse ceux à 10 ans, on parle d’une “inversion de la courbe”. Et cette inversion, elle a eu lieu avant chaque récession depuis les années 1960…
Bref : Hier, les chiffres du secteur privé ont indiqué qu’en septembre, moins de postes ont été créés que prévu. Les investisseurs en ont déduit que le marché du travail pourrait enfin se détendre, ce qui laisse espérer que la Fed pourrait définitivement arrêter les hausses de taux, ce qui a donc permis de calmer les tensions.
Prochain RDV : vendredi avec le rapport sur l’emploi. On vous tient au courant.