En restant floue sur les perspectives, la BCE risque de perdre à son propre jeu

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Publié le
7/3/2025

Pour la sixième fois depuis juin 2024, la Banque Centrale Européenne (BCE) baisse ses taux, alors que l’Europe traverse une période plus que tendue.

Dans les faits : Comme prévu, la BCE a réduit ses taux directeurs de 2,75 à 2,5%. Sa présidente, C. Lagarde, respirait la confiance en évoquant un retour de l’inflation autour des 2 % dans le courant de l'année dans la zone euro (contre 2,4% sur un an en février).

Problème : Cette annonce n’a pas du tout calmé les investisseurs. Les taux d’emprunt des États européens ont bondi : le taux à 10 ans de la France a grimpé à 3,6 %, du jamais vu since 2011. De son côté, le Bund allemand enregistre une hausse record depuis la réunification.



Pourquoi ? Mercredi, l’Allemagne, pilier économique de la zone euro, a présenté son méga plan de relance à 500 milliards d'euros sur cinq ans pour la modernisation du pays.

  • Et alors ? Plan de relance = emprunt massif = augmentation de l’endettement = investisseurs en sueur, donc pour continuer de les attirer, les États émettent des obligations (titres de dettes) à des taux plus élevés. Les investisseurs, qui anticipent déjà, délaissent les obligations existantes, pour se jeter sur les nouvelles, et plus les investisseurs vendent leurs obligations, plus le taux d’emprunt s’envole…  

Et dans ce contexte tendu, les déclarations de C. Lagarde n'ont rien arrangé. Les marchés espéraient que la BCE fasse des annonces plus rassurantes et moins floues sur les prochaines baisses de taux.

  • Concrètement, quand la BCE baisse ses taux directeurs, le coût de l'emprunt baisse, donc de plus fortes liquidités circulent sur les marchés. Les investisseurs prêtent plus facilement aux États, ce qui favorise la baisse des taux d'emprunt.

Mais ça ne s'est pas passé comme souhaité. Les coûts d’emprunt explosent, et mettent sous pression des pays très endettés comme la France. À ce stade, la question de la soutenabilité de la dette pourrait vite revenir sur la table face à l’effort de guerre.

Bref. Entre défis économiques et géopolitiques, la BCE marche sur un fil. Et si les rendements obligataires restent élevés, ils pourraient freiner la reprise économique et annuler les effets des baisses de taux. De quoi compliquer encore un peu plus la tâche de C. Lagarde…