On a fêté hier le 100ème 49.3 dans l’histoire de la Vème République. Mais cette fois, c’est particulièrement mal passé puisqu’il s’agissait de la réforme des retraites.
Contexte : Après avoir passé tous les obstacles, le projet de loi de la réforme des retraites devait être soumis à un vote à l’Assemblée nationale ce jeudi. Mais le gouvernement a commencé à douter de sa capacité à remporter ce vote et c’est là qu’est entré en jeu l’arme favorite d’E. Borne : le 49.3, qu’elle a utilisé hier pour la 11ème fois en 10 mois et qui permet de faire adopter un projet de loi sans procéder au vote de l’Assemblée.
Pourquoi ce forcing ? « Je considère qu’en l’état, les risques financiers, économiques sont trop grands. » a déclaré E. Macron pour justifier l’utilisation du 49.3. Pour rappel, le gouvernement estime que la réforme du système de retraite est nécessaire pour le maintenir en vie. Le déficit annuel du système est estimé à 10 milliards d’euros chaque année entre 2022 et 2032, selon le Conseil d’orientation des retraites (COR).
Ce dont on ne parle pas : Le président a cité “les risques financiers, économiques” et il parle là essentiellement des agences de notation. Pour rappel, les trois principales agences de notation Moody’s, S&P, et Fitch donnent aux investisseurs des informations qui les aident à déterminer la santé financière d’un État.
Pourquoi ? Les États fonctionnent grâce à la dette, et cette dette est contractée grâce aux ventes de titres d’obligations. En clair, si on achète un titre d’obligation français, on prête de l’argent à l’État et en contrepartie, il nous verse chaque année des intérêts et nous rembourse la somme prêtée au terme du placement.
Pour que les investisseurs continuent d’acheter ces obligations, l’Etat doit rassurer les agences de notation qui, à leur tour, rassurent les investisseurs. Plus la note d’un État est élevée, plus le taux d’intérêt de son obligation est faible et vice versa. En clair, une note élevée permet à la France de s’endetter à moindre coût. Et cette réforme qui passe, c’est un signe qui rassure les agences puisque c’est un signe que la France ne fait pas la technique de l’autruche face à son déficit public.
Problème : L’agence Moody’s a confirmé sa note “Aa2” (3ème échelon) de la dette française, mais l’agence S&P n’exclut pas d’abaisser la sienne à cause du ralentissement de l’économie française et de la dégradation des finances publiques du pays. En décembre dernier, Moody’s a ajouté qu’elle maintenait justement cette note pour souligner les efforts engagés par la France pour réformer le système des retraites…
Vous l’aurez compris : En théorie, cette réforme permettrait de rassurer les agences de notation et donc de remonter la note pour pouvoir emprunter plus facilement et donc stimuler la croissance. Mais tout ceci n’est qu’une théorie et quoi qu’il en soit, expliquer tout ça à la population reste difficile quand les prix dans les supermarchés donnent des sueurs froides…